Sauvegarde, réhabilitation et mise en valeur des quartiers historiques pour un développement durable actuel de la ville de Sofia

Vues du quartier 143 et du Marché des femmes sur lesquels porte l’étude détaillée. © D.R.
Vues du quartier 143 et du Marché des femmes sur lesquels porte l’étude détaillée. © D.R.

Le projet de sauvegarde, de réhabilitation et de mise en valeur fut élaboré en 2016 avec le soutien financier du programme Europe géré par la municipalité de Sofia. Il fait suite à des recherches effectuées dans le cadre de l’étude « La ville moderne et la préservation de l’identité nationale », financée par le Fonds national de la recherche scientifique auprès du ministère bulgare de l’Éducation pour la période de 2009-2014.

Lors du travail sur ces projets, des discussions ont été menées à l’échelle internationale avec des spécialistes et des experts de pays européens et notamment des Balkans1 .

En 2015, sous l’impulsion de Madame Fandakova, maire de Sofia, un memorandum est signé avec la mairie du IIIe arrondissement de Paris, afin de développer les travaux engagés en commun. Il a permis la mise en œuvre des modes de gestion sur le quartier historique du « Marché des Femmes ».
Une conférence organisée par le quotidien « 24 heures » et la municipalité de Sofia s’est tenue le 2 juin 2017 à Sofia, sur la base des analyses des quartiers autour du Marché des Femmes. Au cours des discussions en présence d’experts français et bulgares, de ministres, de députés et de maires, une « charte nationale pour le développement des villes historiques» a été adoptée par l’ensemble des participants.
Nos efforts se sont orientés vers un développement du potentiel urbain des quartiers en centre-ville, à proximité immédiate des découvertes archéologiques impressionnantes et des espaces publics centraux remarquables de la capitale.

Quartier 143, vu du ciel, avec, à gauche, le Marché des femmes. ©D.R.

Ces actions ont porté sur le quartier n°143, « petit périmètre », choisi pour son emplacement le long d’une partie du « Marché des femmes » sur le front de rue avec la création d’un Secteur sauvegardé, « Les vieux marchés », à Sofia. Ce travail inclut :

  • la prise en compte du résultat des études sur l’opinion et les attentes des habitants, avec l’implication des propriétaires, des usagers, des experts et des représentants des autorités municipales. Les études portent sur le territoire situé à l’intérieur des boulevards encadrant le grand périmètre.
    Quartier 143 “grand périmètre”. ©D.R.
Silhouettes des fronts de rue. © D.R.
  • l’étude de l’état des bâtiments, des fronts de rue, des espaces intérieurs et des espaces publics des quartiers ; la définition et l’élaboration de prescriptions et d’exigences liées au renouvellement et au développement urbain dans un contexte de sauvegarde de la structure urbaine existante, du caractère de la construction et de prise en compte des monuments classés.
  • l’élaboration de textes juridiques spécifiques pour encourager les opérations de renouvellement et leur efficacité par rapport à l’aménagement urbain et aux besoins de la société, justifiés par une étude concrète du quartier.
  • une proposition de programme de réalisation d’opérations de renouvellement, de développement et de socialisation des quartiers historiques, une condition préalable pour attirer des investissements.

Les quartiers autour du « Marché des femmes » souffrent des mêmes problèmes que beaucoup d’autres zones centrales. Un grand nombre de bâtiments et de rues font partie du tissu urbain traditionnel, apprécié des citoyens et des spécialistes. Ils doivent être protégés et mis en valeur. Une partie importante de ces quartiers nécessite un plan de sauvegarde de la structure urbaine existante et des bâtiments ayant une valeur historique. Ils occupent en partie un territoire dont l’emplacement stratégique interagit avec les zones principales d’infrastructure, du patrimoine, du commerce et de l’administration ; ils impactent directement sur l’activité du centre-ville, l’ambiance et le paysage urbains. Le lien avec les découvertes archéologiques de l’Antiquité au Haut Moyen-Âge nous interpelle sur le développement durable de cet espace, habité et aménagé au cours des siècles.
Nous avons utilisé les conclusions et la synthèse de l’étude sociologique dans le grand périmètre pour compléter l’évaluation générale de l’état de la zone étudiée. Les neuf cents fiches d’enquête menées auprès de groupes ciblés ont permis de tracer des évaluations et des propositions d’utilité publique émises par les répondants au questionnaire sur la zone étudiée.

Quartier 143 “petit périmètre”. ©D.R.

Le petit périmètre : le quartier n°143 fait partie de la zone modelant le « Marché des femmes », c’est pourquoi il a été délimité pour faire l’objet d’une étude détaillée du bâti, des fronts de rue et des espaces publics.
Les deux périmètres se caractérisent par un bâti de valeur à caractère urbain spécifique, ils nous racontent la Capitale dans son développement, durant presqu’un siècle. Mais, plusieurs bâtiments sont délaissés dans un état critique avec des façades délabrées, des décorations et du crépi qui s’effritent ; dans les quartiers occupés par de petits commerces et des boutiques d’artisans, les cours et les espaces intérieurs sont abandonnés.
La construction du métro et la mise en valeur des sites archéologiques à proximité immédiate soulignent la nécessité d’encourager les processus de renouvellement, d’amélioration globale et de réhabilitation du tissu urbain, ainsi que le niveau de vie, tout en sauvegardant le caractère du bâti et l’environnement général. Le quartier-n°143 (petit périmètre) est un exemple si l’on considère son passé historique et son usage fonctionnel actuel. Son état d’aujourd’hui demande d’entreprendre des mesures et des démarches urgentes pour stimuler les processus de réhabilitation de l’environnement urbain dans sa globalité. Ces objectifs sont possibles uniquement avec une politique de renouvellement des quartiers, des secteurs historiques urbains et de la gestion de secteurs sauvegardés.
Sur la base d’une étude minutieuse de tous les bâtiments, des fronts de rue et des espaces intérieurs des quartiers, une analyse propose des solutions pour son développement avec un renouvellement effectif de son image et la sauvegarde de l’aspect de l’ensemble du patrimoine culturel immobilier : « Les vieux marchés ». Deux types de fiches avec photos, plans et textes illustrent l’état des lieux et les recommandations qui s’imposent, comme suit :

  • pour les parcelles qui incluent les bâtiments ou monuments classés et les bâtiments ordinaires, tous faisant partie de l’ensemble du patrimoine culturel immobilier - « Les vieux marchés ».
  • pour les fronts de rue, les quatre rues qui entourent le quartier n° 143.
Fichées détaillées. ©D.R.

Les fiches démontrent clairement l’état actuel de l’ensemble des bâtiments formant le caractère et l’image de la rue et révèle un manque de cohérence de l’ensemble. Au niveau des fronts de rue, une discordance inacceptable entre les hauteurs et le caractère des bâtiments est visible avec des terrains non bâtis, des constructions « temporaires », des petites baraques, etc…
Il est évident que la protection par la « catégorie ensemble patrimonial culturel immobilier », y compris pour le boulevard qui entoure « le Marché des femmes », n’est en aucun cas effective et de nouvelles solutions doivent être trouvées. Des propositions correspondantes ont été faites dans les fiches des différentes parcelles et des fronts de rue. Il faut souligner le fait que les bâtiments historiques protégés nécessitent eux aussi une restauration et un renouvellement, ce qui, malgré leur classement, n’a pas été réalisé de façon satisfaisante jusqu’à aujourd’hui.
La surélévation de certains bâtiments s’intégrant de manière harmonieuse dans l’environnement serait un facteur favorable à l’acquisition de biens privés et municipaux dans le but d’une politique de gestion des bâtiments et des logements qui entrainerait des actions sur l’assainissement, l’entretien et la mise en valeur du bâti.

Ce constat nous amène à une révision des bâtiments et à la prévision de constructions à l’intérieur des propriétés. Nous y trouvons des bâtiments en bon état, d’autres sur le point de s’écrouler, des dépendances et des petites baraques, faciles à enlever. Aussi, faut-il procéder à une étude détaillée de la propriété, mobiliser les propriétaires afin qu’ils s’impliquent dans la réalisation du programme et, ceci, dans le cadre d’une politique de sauvegarde et de développement du quartier. Après suppression de ces dépendances et petites baraques, la réhabilitation de l’espace intérieur contribuera à l’amélioration du cadre de vie, ainsi qu’à l’enrichissement en espaces verts et à l’assainissement de l’environnement urbain.
Pendant ces travaux, l’équipe chargée d’étude a bénéficié de la coopération précieuse de l’administration de l’arrondissement, de la municipalité de Sofia et de l’initiative citoyenne du « Marché des femmes ».
Les données collectées et traitées constituent une bonne base pour attirer des projets d’investissement pour chaque bâtiment, y compris lors des travaux d’assainissement et d’aménagement. Au cours d’une étape ultérieure, nous pourrions définir un périmètre d’étude plus grand, sur lequel appliquer les modèles déjà élaborés et testés ainsi que les réalisations concrètes d’ordre architectural et constructif visant la sauvegarde, le renouvellement et la réhabilitation des quartiers historiques.

Dans le cadre de la politique pour un développement durable de la ville et sur la base de ces études et conclusions, une proposition d’opérations de renouvellement urbain et de textes juridiques spécifiques ont été élaborés à partir des analyses effectuées dans ce quartier. La proposition inclut des textes pour l’adoption d’un arrêté prenant en compte des dispositions de la loi de l’aménagement urbain et de la construction sur le territoire de la municipalité de Sofia et le cadre législatif en vigueur.

  1. Merci pour leur intérêt professionnel et leur coopération à Yves Dauge, sénateur honoraire  ; Alain Marinos, inspecteur général de l’architecture et de patrimoine honoraire ; Frédéric Auclair, alors président de l’ANABF ; Benoit Melon, directeur de l’École de Chaillot, centre de formation de la Cité de l’architecture et du patrimoine ; Jean-Paul Midant, directeur pédagogique du DSA patrimoine de l’ENSAPB ; Jeanne Montagnon, coordinatrice de ce projet. L’histoire de cette coopération est présentée en détail sur le site d’Alain Marinos.
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