Les territoires de la Loire, des portes de l’Anjou à l’océan

Une identité ligérienne, une culture à préserver, une dynamique de territoire.

La Loire est un marqueur d’identité pour la région des Pays de la Loire traversée par ce fleuve qui lui a donné son nom. Lorsqu’elle quitte Angers en descendant vers l’océan atlantique, c’est une autre Loire qui s’offre à nous : moins homogène qu’en Val de Loire, elle présente des caractéristiques singulières. Sur ces cent quarante derniers kilomètres, on l’appelle Loire océane.

Ces territoires offrent de grandes qualités paysagères grâce aux multiples visages de cette Loire. Reconnus pour ses espaces naturels exceptionnels, ce sont des territoires vivants où l’activité humaine a joué et joue encore un rôle important.

La Loire, une limite

Il existe sur la Loire océane un éventail d’outils pour la protection des richesses de la Loire : ceux à caractère environnementaux définis par la Zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff, Natura 2000, etc.) et ceux à caractère plus culturels définis par l’Unesco, les parcs naturels régionaux (PNR) et leurs sites classés et inscrits, comprenant les abords de monuments historiques, la Zone de protection du patrimoine urbain et paysager (ZPPAUP) où l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP) et du secteur sauvegardé. Ces outils de grand intérêt tendent à fragmenter le territoire. Ils ont leurs propres logiques de gestion, sans cohérence d’ensemble et définissent des zones entre lesquelles restent de nombreux “vides”. De plus, la Loire est souvent utilisée comme une limite, une frontière, et non comme un élément structurant le territoire. En 2011-2012, la région des Pays de la Loire a organisé, avec la participation de l’État déconcentré, des « Assises régionales de la Loire et de son estuaire » afin d’engager une réflexion commune à mener sur les territoires du fleuve. Dix actions structurent un programme qui mérite d’être complété au regard des enjeux culturels de ces territoires.

Appropriation du fleuve et culture ligérienne

Les espaces de la Loire océane sont peu protégés au niveau patrimonial. Seuls quelques ZPPAUP/AVAP et certains périmètres de protection de monument historiques débordent sur le fleuve.

Au-delà de ses usages et de ses pratiques, le fleuve constitue un élément structurant du paysage (patrimoine hydraulique), mais aussi d’aménagement (les quais, les levées ou les ponts) et fait ainsi partie de la culture ligérienne ; il est relativement méconnu, ce qui le met en danger. Comment considérer ces espaces de qualité patrimoniale ou culturelle au sein des documents de planification ?

La présence de nombreux acteurs et des différents outils existants, le fractionnement
récurrent entre les parties amont/aval et rives nord-sud interrogent sur l’utilité d’une gouvernance. Quel projet rassemblerait tous les acteurs sur ce grand territoire ?

Chacun cherche à s’approprier le fleuve. De nombreuses activités, récentes ou traditionnelles, voire des expositions d’art contemporain, s’y développent et bénéficient d’un succès remarqué. Non seulement elles participent à l’affirmation d’une culture ligérienne, mais elles jouent un rôle pour l’économie de ces territoires. En effet, le territoire est un vecteur d’ancrage pour les entreprises. La fierté et le sentiment d’appartenance à son territoire sont forts, autant pour les dirigeants que les salariés. La question du cadre de vie est donc fondamentale pour l’aménagement du territoire qui s’organise.

Vers une dynamique de territoire

D’une part, de nombreuses réflexions ont été engagées sur ces espaces et particulièrement sur l’estuaire. D’autre part, de nouveaux outils de gestion et/ou de protection sont à l’étude actuellement (Réserve naturelle nationale (RNN) et PNR sur l’estuaire, deux sites classés en amont de Nantes). Face au risque d’aggraver l’émiettement, il s’avère primordial de considérer ce tronçon de la Loire comme un ensemble dont la stratégie d’intervention pourrait reposer sur quatre axes d’actions :

  • fédérer tous les acteurs autour d’un projet de territoire, mais avec quelle gouvernance ?
  • réserver un patrimoine culturel, élément incontournable du cadre de vie ;
  • promouvoir l’appropriation de la Loire par tous et pour tous ;
  • anticiper le risque d’inondation au quotidien.

La culture ligérienne a un rôle à jouer. Et face à cette métropole nantaise qui ne cesse de grandir, les petites villes et villages qui ponctuent les rives du fleuve ont tout intérêt à se fédérer autour d’un projet ligérien.

Le concept développé par l’Association des petites cités de caractère (PCC) répondrait aux problématiques de ces territoires. L’une des caractéristiques de ce concept est la démarche volontaire des élus qui “candidatent” pour une homologation. Françoise Gatel, sénatrice d’Ille-et-Vilaine et présidente de l’association, souligne que l’action du réseau Petites cités de caractère « est d’abord d’accompagner des élus qui souhaitent concilier le développement de leur commune dans le respect du patrimoine ». Il s’agit de fédérer les communes signataires et les différents acteurs autour de la sauvegarde du patrimoine comme levier de développement des territoires. De plus, la marque touristique PCC est reconnue pour sa qualité et son attractivité au niveau national.

Aujourd’hui, le réseau prend de l’ampleur surtout le territoire national avec le souci de respecter des identités locales différenciées. L’homologation « Petites Cités de Caractère Ligériennes » dans le cadre institué au niveau régional et fédéré au niveau national permettrait plusieurs plans d’action. Localement, elle permettrait la création d’une instance de gouvernance et la rédaction d’une charte adaptée aux problématiques ligériennes pour une application dans les politiques locales et notamment les documents de planification (SCOT, AVAP, PLU, etc.).

Ce projet, permettrait sans aucun doute de faire cohérence sur ce territoire en coordonnant les actions et les outils complémentaires à mettre en place avec cette nouvelle gouvernance portée localement par les collectivités.

Élodie DEBIERRE
Architecte des Bâtiments de France, chef du STAP-Indre.