Les habits neufs de la médiathèque

Maître d’ouvrage : ministère de la Culture et de la Communication (Oppic).
Maître d’œuvre : Pierre-Louis Faloci architecte, Igrec ingénierie
Montant du projet : 18,7 millions d’euros.
Durée du chantier : été 2012 - printemps 2014

Par une coïncidence de calendrier, c’est en 2014, année où le Parlement sera amené à débattre d’une nouvelle grande loi sur le patrimoine, que le nouveau Centre de la documentation patrimoniale de Charenton-le-Pont ouvrira ses portes. Il s’agira du point d’achèvement d’une aventure commencée en 2008 lorsque la médiathèque de l’architecture et du patrimoine s’était vue signifier, à la suite d’un amendement parlementaire, son expulsion de son site parisien du Marais vendu par France Domaine, et que l’ancien séminaire de Charenton-le-Pont (qui abritait jusque-là l’école d’architecture de Paris Val-de-Seine) avait été retenu comme alternative. L’importance des surfaces disponibles sur ce site (neuf mille cinq cents mètres carrés en SHON) permettait en effet d’envisager un projet répondant aux besoins de la médiathèque en matière d’espace de conservation et d’accueil du public, mais aussi de proposer au Conseil international des monuments et des sites (Icomos) et à son comité français de s’installer place. Au-delà de la seule optique d’une réinstallation contrainte, ce projet novateur renouvelle les missions et la place d’un service en le mettant au diapason des nouveaux besoins des professionnels et du public du patrimoine monumental, photographique et urbain.

Un projet novateur et d’actualité

Dès 2008, simultanément à un aménagement provisoire opéré dans l’urgence pour assurer la continuité du service, le ministère préparait la seconde phase, qui va s’achever dans quelques mois, en chargeant un conseil d’orientation de réfléchir au positionnement de la médiathèque du futur à l’occasion de son installation définitive à Charenton : à charge pour le projet architectural d’en permettre la concrétisation. Les préconisations ambitieuses qui ont guidé le projet demeurent pleinement d’actualité et en phase avec les orientations à l’œuvre en cette fin d’année 2013 :

  • répondre aux impératifs du nouveau contexte plus concurrentiel né de la fin du monopole des ACMH et du besoin d’une communication des documents aux maîtres d’œuvre ainsi qu’aux restaurateurs ;
  • assurer l’accueil et le traitement des nouvelles archives des agences ;
  • assurer, pour les collectivités territoriales, une fonction de centre de ressources concernant les secteurs sauvegardés et les études urbaines ;
  • contribuer à une meilleure connaissance des fonds photographiques conservés au fort de Saint-Cyr, le site de Charenton leur donnant une plus grande visibilité en proposant les archives les plus demandées (tirages notamment) tandis que le fort de Saint-Cyr conservera, dans la plupart des cas, la matrice (plaque de verre ou support souple) ;
  • consolider et accroître son rôle de production et de valorisation numérique (la médiathèque est le second contributeur aux bases de données patrimoniales du ministère) en lien avec les autres services du ministère et en apportant un contrôle de cohérence des données présentées ;
  • de façon générale, sur le site où sur la Toile, décliner une large action de valorisation tant des ressources que des métiers et des savoir-faire présents à la médiathèque.

La traduction architecturale

C’est tout le talent de l’architecte Pierre-Louis Faloci, lauréat du concours, que d’avoir su répondre à ces exigences variées pour en tirer une réalisation originale et cohérente, que l’on découvrira à la fin du premier semestre 2014. À l’exception d’une partie des toitures, le projet préserve l’architecture classique du bâtiment tout en la faisant dialoguer avec une écriture contemporaine, notamment par la présence d’une façade extérieure en verre. Il recompose une partie des espaces internes afin d’y accueillir de nouvelles surfaces dédiées à la conservation, au stockage, à l’administration, ainsi qu’à l’accueil et à la consultation. Les surfaces utiles sont portées de 5 164 m2 à près de 7 000 m2. Pour y parvenir, les carrières ont été comblées de façon à pouvoir supporter les très importants volumes d’archives qui vont trouver leur place dans cette nouvelle institution et l’intérieur a été réaménagé pour offrir des espaces fonctionnels et lumineux.

Le nouvel espace offrira ainsi :

  • vingt-quatre kilomètres d’équivalent linéaire d’équipements de stockage disposant d’excellentes conditions de conservation ;
  • une vaste salle de lecture commune ;
  • un hall d’accueil pouvant le cas échéant accueillir évènements et expositions ;
  • un auditorium de deux cent cinquante places et des salles de réunion.

Les salles dédiées à la conservation se conjugueront avec des départements bien identifiés (Archives, Immeubles et Objets, Centre de recherche sur les monuments historiques, Photographie). Le hall d’accueil se substitue aux deux anciens amphithéâtres, permettant ainsi de récupérer espace et luminosité. La salle de lecture est située au premier étage. Au-dessus, trois grands blocs, comme en suspens, symboliseront les trésors de la médiathèque et accueilleront surfaces d’archives, bureaux et salles de réunion.

De nouveaux espaces de travail et des bureaux prendront place sur le haut du bâtiment central, réaménagé et revêtu à l’extérieur de matériaux se situant dans la continuité du reste de l’édifice. Le bâtiment latéral sera occupé totalement par l’ICOMOS et le dernier bâtiment par le Comité national de l’ICOMOS en France ainsi que par la Donation Jacques-Henri Lartigue, déjà présente sur l’ancien site.

Manuel BAMBERGER
Chef de projet


Parole d’architecte

Le projet de la médiathèque de l’architecture et du patrimoine de Charenton est une occasion de plus pour l’agence de traiter la question de la sédimentation d’une architecture contemporaine sur un bâtiment ancien. Ici, il nous paraissait important de garder le maximum de l’enveloppe extérieure en incrustant un nouveau programme particulièrement prestigieux puisqu’il s’agit des archives de l’architecture française. La composition dans l’espace de ces nouvelles fonctions offre d’immenses verticalités et une monumentalité intérieure au service du sujet. La peau de verre détachée de la façade sur l’entrée permet d’exprimer l’une des racines majeures du projet mettant en évidence les vieilles pierres. Ce rapport entre le moderne et l’ancien s’exprime aussi par la rigueur technique nécessaire au maintien des façades anciennes et à l’apesanteur des nouveaux volumes créés.

Pierre-Louis FALOCI