La colline du Colombier

Iguerande, déjà le nom fait rêver. À quelques kilomè-tres de Roanne, dans cette partie du Brionnais qui propose un paysage sans artifice, un nouveau type d’hébergement a vu le jour.

À l’initiative d’un couple de restaurateurs, une ancienne ferme composée de trois bâtiments a retrouvé son hospitalité première. Le grand couvert qui servait au fourrage et aux bêtes est transformé en restaurant ; le bâtiment ouvrier abrite l’accueil et un studio, enfin le colombier, qui a reçu une extension, sert de gîte. Cependant, il manquait encore des chambres pour équilibrer l’exploitation. L’idée des cabanes s’est imposée, en adéquation avec le paysage vallonné.

Une conception nomade

Il y a deux ans, l’agence avait été confrontée au développement des petites communes rurales. La présidente de la région Poitou-Charentes nous avait enjoints de l’accompagner dans ses tournées pour prendre la mesure des difficultés d’aménagement d’une salle de réunion ou d’un équipement de loisirs dans un village de deux cents habitants. L’incapacité financière des mairies les conduisait immanquablement à recourir aux DDE, plus aptes aux infrastructures urbaines qu’aux petites opérations de qualité. Le Conseil régional envisageait donc de prendre à sa charge l’étude préalable et de participer à hauteur de 50 % à la réalisation des projets. Ce pari exigeait un atelier commun ambulant ; sur le modèle du bouilleur de cru qui sillonnait les campagnes, nous avons interprété un bureau qui s’attelait à un tracteur et pouvait nous accueillir d’un site à l’autre. Réminiscence de la hutte ou de la tente, il a permis de s’implanter sur le territoire, de s’imprégner de l’architecture vernaculaire et de donner à chaque maire une réponse en harmo-nie avec le charme agreste des lieux.

Cette expérience en milieu agricole, qui aurait pu se poursuivre par des projets plus précis de lotissements ou de préaux d’école, a trouvé un aboutissement inattendu à la colline du Colombier. Il fallait concevoir à l’échelle de la ferme, sur un terrain bordé de haies, de petites habitations ouvrant sur le paysage : être contemporain sans marquer l’existant. Trois cadoles, (du terme désignant les abris de vignerons et du nom de la créatrice du soutien-gorge) ont été implantées et des jardins plantés. Les végétaux sont les mêmes que ceux du pays de Charlieu et les cadoles utilisent des matériaux locaux comme l’auraient fait autrefois les paysans qui agrandissaient leur domaine au fur et à mesure de leurs besoins.

Des prototypes

Deux cadoles sont posées sur pilotis et la troisième repose sur le sol pour répondre à la topographie du terrain. D’une surface d’environ soixante mètres carrés, elles sont nées à la fois du vol des oiseaux et du repli de la feuille. Elles disposent d’une grande ouverture qui sert d’accès et, plus on s’enfonce, plus on gagne en intimité, passant de la terrasse au salon, puis à la chambre nichée dans une coque d’acier recouverte intérieurement d’une laine tricotée. Les constructions utilisent des matériaux naturels, bois, chanvre, feutre et confèrent au site une force et une jeunesse que l’on retrouve dans les éléments de décor du restaurant.

Patrick Bouchain
Architecte

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