Nouveau départ pour les sites inscrits

Après la promulgation de la loi n° 2016-925 du 8 juillet 2016, relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) puis, celle de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (les deux textes sont codifiés), il est intéressant de faire le point sur les évolutions relatives aux sites classés et inscrits qui en découlent, considérant que ces deux textes ont un effet sur ces servitudes et que le travail quotidien des architectes des bâtiments de France (ABF) et les stratégies territoriales qu’ils mettent en place sont concernés.

Les évolutions sont de deux ordres. D’une part les codes du patrimoine et de l’environnement introduisent le principe d’une articulation entre eux pour le régime des autorisations, ainsi qu’une hiérarchisation des différentes protections des espaces et du bâti. D’autre part, le code de l’environnement prévoit une révision des protections des monuments naturels et des sites (article L341-1-2), qui ont été inscrits antérieurement au 8 août 2016, d’ici le 1er janvier 2026.

Le premier point s’inscrit dans la politique des simplifications administratives en cours et cette nouveauté est une avancée significative, largement portée par le MCC. Le principe de l’articulation est simple et il existait déjà pour d’autre procédures. À partir de maintenant, tout demandeur dont le projet serait concerné par un site classé et une servitude du code du patrimoine n’aura plus qu’une seule demande à faire, les services de l’État se chargeant de se coordonner et au final, une autorisation vaudra pour l’autre, selon les cas : Si le projet concerne un monument historique (MH), c’est le préfet de région qui recueille l’accord de l’administration chargée des sites avant de prendre sa décision ; si le projet est dans un site patrimonial remarquable (SPR) ou aux abords, de façon symétrique l’administration chargée des sites ne peut délivrer d’autorisation que si l’ABF a donné son accord. On peut observer, à travers ces articulations comment se dessine une hiérarchisation, dans la protection des espaces, ce qui n’existait pas auparavant : les monuments historiques constituent l’enjeu maximum, puis viennent les sites classés, les SPR, les abords et enfin, les sites inscrits. De cette façon cette dernière protection s’efface devant les précédentes et les ABF n’auront plus à émettre des avis sur des servitudes multiples mais uniquement sur la plus « élevée » dans l’échelle précitée.

Pour ce qui est de la révision du stock des monuments naturels et des sites inscrits, il y en un peu plus de 5 000, c’est une autre affaire et ce futur chantier de grande ampleur peut laisser perplexe… Tout d’abord, il faut rappeler que les deux ministères ont travaillé sur ce sujet entre 2000 et 2005 et que cela avait abouti à une circulaire en 2007, « Orientations pour la politique des sites » qui posait les bases d’une « révision » des sites inscrits à partir du constat que les ABF en étaient, en fait, les gestionnaires de fait et que cela provoquait une charge de travail importante avec parfois peu d’efficience, sans que l’initiateur des protections le réalise concrètement. Le bilan qui avait suivi ce travail réalisé entre 2000 et 2005 était alors le suivant : certains sites inscrits avaient été tellement dégradés que l’objet initial de leur protection avait disparu et qu’il était absurde d’y émettre des avis dans ces conditions. À l’inverse d’autres, du niveau du classement méritait de l’être et, enfin, une partie, à caractère plus urbain, qui représente en fait à peu près un tiers en quantité, pouvait évoluer vers des ZPPAUP.

Mais, force est de constater que dix ans plus tard, très peu de cas ont été réglés. La surcharge de travail ou le désintérêt des services pour cette question sont les principales raisons de ce statu quo. Dans quelques cas où la volonté de faire des services de l’Etat était bien présente les élus ont été réticents et cela a suffi pour décourager ces initiatives.

Finalement, parce que la demande sociale se fait plus pressante, que celle des services est toujours présente et que la simplification administrative est de mise, ce qui relevait d’une circulaire a gagné en puissance en devenant un support législatif. Gageons que cette nouvelle manière de faire aura plus de succès et que le système d’avis simple des ABF portera sur un stock subsistant raisonné, dont les enjeux paysagers seront reconnus.

Il restera encore, par la suite à réfléchir au régime d’autorisation en vigueur dans ces espaces, l’avis simple de l’ABF étant une solution trop intermédiaire entre accord et recommandations, obligeant l’ABF à répondre sans que cet avis soit obligatoirement pris en compte. À l’heure des processus de simplification administrative, cette formule devient totalement obsolète et des pistes comme l’assimilation aux sites patrimoniaux remarquables (SPR) ou la prise en compte obligatoire dans les documents d’urbanisme sont certainement à étudier.

Textes de référence :

  • Code de l’environnement : titre IV « Sites » du livre III (chapitre unique), L.341-1 à L.341-22 puis, R.341-1 à L.341-31.
  • Code de l’environnement : Titre V « Paysage », L.350-1A à L.350-3, (5 articles dont 4 créés par la loi du 8 août 2016), puis R.350-1 à R.350-15 (A ce stade, aucun article réglementaires relatifs à la loi du 8 juillet 2016).
  • Circulaire du 11 mai 2007 « Evolution de la politique des sites », non opposable.
  • Circulaire du 1 mars 2007 « Politique des paysages ».
  • Circulaire du 30 octobre 2000 « Orientation pour la politique des sites »

Nota : Les trois circulaires ci-dessus sont citées à titre de documentation afin de donner un éclairage complémentaire sur la politique des sites du ministère de l’environnement depuis 2000. Ces circulaires n’ont qu’une valeur d’archives, n’ayant pas été publiées sur la liste des circulaires opposables (www.circulaires.gouv.fr).